Avec First Click Free, Google met la presse en face de ses responsabilités

Mardi dernier, la nouvelle est tombée : Google a annoncé la mise à disposition des éditeurs de presse d’un outil, appelé First Click Free, permettant de limiter le nombre d’accès gratuits à leurs articles par les utilisateurs venants de Google News et Google Search. D’après ce que j’en ai compris (dites-moi si je me trompe), cet outil permettra aux éditeurs de paramétrer un nombre d’articles autorisés en lecture par jour. Par exemple : si le groupe de presse A choisit de mettre 3 articles en gratuits, et bien le visiteur qui arrivera, dans la même journée (la durée de validité du compteur pourra être également paramétrable à mon avis), au 4ième article, se verra redirigé vers une page de paiement pour accéder à l’article voulu.

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Cette annonce m’inspire plusieurs éléments (ce qui explique mon retard à l’écriture).

La menace de News Corp comme déclencheur

Oui, il y a bien sûr News Corp par la voix de Rupert Murdoch qui a dû faire pencher la balance, et accélérer le processus. Mais je en crois pas que ce genre de système se développe en seulement trois semaines, donc je pense qu’il était à l’étude depuis quelques temps déjà. Ce n’est pas la première fois que Google News est critiqué pour le trafic qu’il « volerait » aux éditeurs de presse. Donc aujourd’hui, c’est en réponse à ces critiques que Google met à disposition cet outil.

Les éditeurs sont face à leurs responsabilités

Autant il était facile de crier au loup, autant pour les éditeurs mécontents, maintenant il va falloir travailler ferme. Eux qui clamaient haut et fort que Google leur volait leur contenu peuvent désormais choisir de ne pas laisser Google « en profiter », et exiger un paiement. Là où ça risque d’être drôle, c’est dans la situation suivante :

Considérons qu’il y a deux types de lecteur de l’actualité.

  • Les habitués, qui ne passent jamais pas Google pour avoir leurs infos, et qui vont directement sur le site de leur journal préféré (ou qui l’ont dans leur flux RSS/sont abonnés à sa newsletter, cela revient au même) ;
  • Et les non-habitués, qui prennent Google News pour ce qu’il est, c’est à dire un agrégateur d’info. Quand ils voient une info qui les intéressent, ils cliquent sur le premier lien du groupe d’article, ou bien sur le deuxième ou troisième. Bref : ils n’attachent pas d’importance à la source d’info. Si Google les en empêche, au bout d’un certain nombre de clics d’accéder à tel article, qu’à cela ne tienne, ils prendront le lien suivant. La provenance ne les motive pas, donc ils ont le choix. Ils veulent juste l’information.

Sauf que First Click Free ne s’applique pas que à Google News. Le service s’applique aussi à Google Search. Et dans le moteur, les articles sont en compétition avec tout le monde, et pas seulement les autres groupes de presse. Quelle différence ? LA différence est de taille. Sachez que tous les gros médias sont copiés de multiples fois sur le web, par des robots ou des petits rigolos. Sauf que, quand on bloque l’accès à un article qui arriverait en haut des résultats Google, cela contraint l’auteur de la recherche sur Google -s’il ne veut pas payer- à revenir en arrière (sur la page des résultats) et à prendre le deuxième lien (ou le troisième), qui seront, eux, des copies du lien numéro 1.

Bref : le trafic que les éditeurs refuseront ira dans les mains des copieurs (quand il n’ira pas dans les mains de la concurrence). Après, on peut toujours dire qu’on fera la guerre aux copieurs, mais je n’y crois pas non plus. Rien de plus simple que de mettre un flux RSS délocalisé et copié sur des serveurs dans un pays peu dérangeant, mais accessible de partout ! Avec quelques bonnes idées sur l’URL (par exemple, un nom de domaine en tous-les-articles-du-monde.com pour un site copiant le flux RSS du Monde), on peut arriver en haut des résultats de requètes Google (juste après le site du Monde, bien évidemment), et récupérer une grosse part des miettes (les gens qui ne payeront pas l’abonnement demandé au n-ième clic et prendront le 2ième résultat dans Google).

Google ne s’engage pas beaucoup dans l’affaire

Cela dit, vous remarquerez que le système n’est pas obligatoire, et Google espère bien qu’un minimum d’éditeurs l’utiliseront. Pourquoi ? parce qu’ils comprennent bien que les éditeurs qui passeront sur le système reviendront très vite à la situation antérieure, désormais convaincus des bienfaits de Google.

On peut voir également le fait que Google propose via le système First Click Free son propre système de paiement (pas obligatoire non plus à mon avis, mais disponible). Si le système se développe, il est possible qu’apparaissent des lots achetés en gros : par exemple, un utilisateur pourra avoir un porte monnaie chez Google (tiens tiens, le Google Wallet, un des premiers produits de la firme !), lui permettant d’avoir un crédit de n articles. Un accès à 1000 articles pour 15 euros, par exemple. Cela permettra à Google de décompter de manière transparente le nombre d’articles que vous avez « consommé », et de vous les lister dans une jolie pages.

Tout ça est encore un peu flou. Gageons que nous auront davantage d’éléments là-dessus d’ici peu.

Pour ma part, le seul journal « officiel » que je lis est gratuit (c’est un pure player fonctionnant sur la base de la publicité), et il s’appelle Rue89. Je vous conseille d’y aller régulièrement, vous n’y perdrez pas.

2 réflexions sur « Avec First Click Free, Google met la presse en face de ses responsabilités »

  1. Mouais je suis pas trop fan de par leur coté anti sarko assez marqué (ce sont des anciens de libé).
    A lire ce post d’un des fondateurs qui est parti critiquant le coté opposition à outrance et le fait qu’au départ ils ovulaient mettre en avant des articles venant d’autres que des journalistes alors qu’au final c’est en majorité des journalistes qui écrivent pour le site.
    http://www.mikiane.com/node/2008/02/21/pourquoi-je-veux-%C3%A0-nouveau-quitter-rue89

    Je pense que l’essentiel est surtout de varier ses sources, faire confiance à un seul journal peut être dangereux 🙂

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  2. Salut PatatoOor : oui, il est vrai que la ligne directrice est portée à gauche. Mais ça ne me dérange pas (j’écoute à mon avis assez d’émissions à la radio et je lis assez d’articles sur le net pour faire la différence quand je lis des truc un peu trop orientés). En tout cas, merci pour le lien, je connais Mikiane de nom, mais je n’avais pas lu son article.

    Pour le reste, tu as raison, l’essentiel est de varier les sources. Pour ma part, j’aime lire les blogs. Mais pour ce qui est des journaux, je ne suis « abonné » qu’à Rue89, ce qui ne m’empêche pas de lire d’autres articles, quand je tombes dessus, notamment via des liens sur Twitter par exemple.

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