Dans un billet très intéressant paru sur TechCrunch, Nikhyl Singhal, co-créateur et PDG de la startup SayNow, donne son avis sur l’évolution du marché de la téléphonie. Il raconte notamment que Mark Zuckerberg (PDG de Facebook), le 21 juillet dernier, a fortement douté de la longévité des téléphone : « je ne sais pas encore combien de temps nous allons utiliser les téléphones ». Et Nikhyl Singhal de penser que selon lui, les téléphones pourraient vivre leurs cinq dernières années.
Qui va donner en premier l’assaut ? Voice Mail et Skype sont simplement les premiers à se lancer dans la bataille. Il y aura ensuite Facebook, Apple, Yahoo et Microsoft, qui suivront certainement avec plus ou moins de succès d’ailleurs. Il semblerait cependant que Facebook soit le plus à même de donner aux opérateurs le coup de grâce. Et cela commence par les numéros.
Tiens tiens, c’est quasiment l’idée que j’avais défendu dans un précédent billet sur le lancement de Facetime sur tous les devices d’Apple :
D’une part, FaceTime n’est pas qu’un simple protocole de vidéochat (je rappelle que ce protocole est ouvert et basé sur des technologies ouvertes). C’est à mon avis beaucoup plus. En terme de marketing, on a vu à quel point Apple pouvait déjà faire rêver en montrant des vidéos de gens « rassemblés » par FaceTime. Apple va donc utiliser FaceTime comme argument déterminant pour vendre ses futurs devices. Et il y a des chances que ça marche, étant donné le retard qu’ont les autres constructeurs dans le domaine.
Ensuite et enfin, il y a des chances qu’Apple n’hésite pas à dire que FaceTime est gratuit (puisque ça passe par le wifi). Cela pourrait être une première pierre jetée par Apple dans la mare aux opérateurs téléphoniques. Si Apple généralise l’utilisation du wifi pour les appels (ce qu’ils sont grosso modo en train de faire, en favorisant le wifi), ils vont mettre d’autant plus la pression sur les opérateurs téléphoniques qu’ils le font avec l’iPhone4, qui s’avère n’être pas une si bonne affaire pour eux.
L’auteur est certain que nos petits enfants ne composeront jamais de numéros (donc on va estimer ça grosso modo à 20 ou 30 ans). Cependant, il ne dit pas que la disparition des numéros signifie la fin des appels téléphoniques. Les gens continueront d’utiliser des téléphones, mais ils n’auront plus à numéroter les numéros avant de débuter chaque conversations.
Passons en revue les raisons qui font que les numéros sont amenés à disparaître :
- L’absence de contrôle. N’importe qui peut composer les 10 chiffres de votre numéro, votre Ex, un déséquilibré comme un représentant de commmerce. Et bien que des systèmes de liste rouge et de présentation du numéros ont été créé et mis en place, cela n’empêche pas les appels non voulus.
- Les numéros sont liés à l’opérateur et non pas à l’utilisateur. Chaque personne a plusieurs numéros : son fixe, son portable. Dès que vous résiliez votre abonnement (en France, si vous ne faites pas de transfert de votre numéro sur votre abonnement suivant), vous changez de numéro.
- L’expérience utilisateur est limitée. Le téléphone n’est destiné qu’à une seule utilité : composer un numéro et avoir une conversation avec un interlocuteur. Ce n’est pas prévu pour autre chose que cela, et le peu de praticité des conférences et autres messageries vocales montre bien que toutes autres expériences que la conversation téléphonique sont plus ou moins vouées à l’échec.
Comparez cela à vos réseaux sociaux numériques. Vous avez là à portée de la main toutes les informations possibles sur vos contacts, que ceux-ci ont bien voulu mettre à votre disposition. Vous avez en effet le contrôle sur vos informations et sur qui peut les voir.
Vous pouvez envoyer des messages sur Facebook à n’importe qui, même s’ils ne font pas parti de vos amis. Idem dans l’autre sens. Le réseau choisit une police de sécurité que l’utilisateur est libre de changer contrairement aux numéros de téléphone. Google, Skype et d’autres ont amélioré l’expérience téléphonique en passant par le web. Mais cette démarche est vite limitée car il y manque cette couche de social qui fait la différence.
Ici je me permets de constater que si aujourd’hui le facteur d’instabilité des numéros est bien l’opérateur téléphonique (car dès qu’on en change, on change potentiellement de numéro), ce problème risque bien d’être dans le futur décalé à la notion de réseau social : dès que vous changez de réseau social, il faut vous recréer un compte, une liste d’amis, etc. Là aussi, il faudra donc une certaine interopérabilité entre les réseaux, des standards à tous les niveaux : notez enfin que cette interopérabilité n’existe pas encore, et j’ai des doutes sur le fait qu’elle soit à l’ordre du jour chez les Facebook, Google ou Apple…
A la différence des autres, Facebook apparait comme un excellent concurrent du téléphone, car bien que très critiqué pour leur politique de sécurité, il donne un grand contrôle sur vos informations. Là où cela devient intéressant, c’est que sur ce service votre réseau de connaissance est déjà constitué, et vous pouvez contacter tous ceux qui y sont inscrits. En clair, il ne manque plus à ce service en ligne que la fonction téléphone. Ne vous est-il pas déjà arrivé de voir écrit sur le mur des uns ou des autres : « Pourquoi ne réponds-tu pas à mes appels ? ».
L’auteur du billet sur TechCrunch note enfin l’importance des smartphones dans la relation entre la voix et notre réseau social : sur pas mal de smartphones, on peut intégrer son annuaire Gmail, Facebook ou Twitter avec son annuaire téléphonique, de mails et de SMS. En somme, les applications de smartphones sont autant de points d’entrée (et de points d’interopérabilité) pour faire converger sur le device tous vos comptes et les informations associées.
Peut-être que la vraie évolution apportée par les smartphones sera celle-là : devenir le point de convergence sociale des différentes API des réseaux sociaux auxquels nous sommes inscrits. Et si on parvient à réaliser cela sur des smartphones, alors il n’y a plus grand chose qui nous retient de le faire via un service en ligne.
Ce n’est pas qu’on va plus utiliser de téléphones (presqu’aucune chance que ça arrive avant loooooooongtemps), c’est surtout que les appels téléphoniques ne vont plus s’effectués grâce aux opérateurs que l’on connait et que c’est bien la VOIP qui va prédominer.
Plus de téléphone, et quoi encore ? On fait comment après ? On réutilise des signaux de détresse ?
@pfiou: Oui, c’est vrai. C’est ce que je voulais dire (d’ailleurs, le titre du billet est « les opérateurs téléphonique de demain etc », ce qui rejoint ce que tu dis).
Hummm très intéressant comme article.