Un billet très intéressant écrit par Fabrice Epelboin sur RWW (voir ci-dessous), explique que, à la suite de la mort de Jiwa, les responsables politiques et les partisant de la HADOPI commencent à se poser des question sur la viabilité de l’offre légale disponible en ligne. Point intéressant : cette viabilité apparait très contestable, tout en mettant en avant la domination du marché d’Apple/iTunes, et donc le pouvoir de négociation accru d’Apple envers les oeuvres musicales. C’est à mon avis le point le plus intéressant dans l’analyse.
Version HD de ce fond d’écran ici.
En effet, peu de monde croyait en la viabilité de la HADOPI et/ou de l’offre légale gratuite. Ce qui est intéressant, c’est de voir que les petites gué-guerres interne et nationales entre acteurs de la musique ont conduit à s’affaiblir mutuellement, jusqu’à se rendre compte que le seul bénéficiaire de cette situation est en train de devenir Apple, désormais assimilable à un ogre américain.
L’article (sous licence Creative Content BY-SA) est ci-dessous :
Le clan des (ex) pro Hadopi continue de se diviser
Ecrit le 09 août 2010 par Fabrice Epelboin
Théorie des dominos ? Suite au coup de gueule de la secrétaire d’Etat à l’économie numérique provoqué par l’arrêt de Jiwa, ce sont désormais les ayants droits qui affichent des positions divergeantes. La SCPP continue, droit dans ses bottes, et selon ses propos rapportés par Numérama, fait part de son «étonnement» et s’oppose fermement à la gestion collective, arguant qu’ « il n’existe […] aucun motif d’ordre juridique, économique ou culturel pour justifier l’expropriation des droits des artistes interprètes et des producteurs de phonogrammes« . N’hésitant pas à pousser le bouchon le plus loin possible, la SCPP, qui vient de réélire Pascal Nègre à sa tête, cite en exemple Deezer et Spotify – alors que le premier a été pris d’assaut par Orange après la mise au placard de son président, incapable de réaliser des profits, et le second présente un déficit systémique chronique -, mais misant probablement sur l’ignorance de ses interlocuteurs, la SCPP n’hésite pas à nier l’évidence et affirme que «la négociation contractuelle, dans un cadre collectif ou individuel, n’est pas un obstacle au développement de l’économie numérique». L’ADAMI, elle, citée par PCinpact, se montre plus sensible à la situation de monopole qui se dessine. Voyant poindre une domination absolue du marché par Apple, seul acteur en mesure d’imposer son point de vue aux ayants droit, elle considère la disparition de Jiwa comme une «très mauvaise nouvelle pour la diversité musicale sur Internet», et n’hésite pas a aller dans le sens des propos de NKM : «L’accès aux catalogues musicaux doit être facilité par des mesures de régulation que seul l’État peut impulser», démentant les propos tenus par la SCPP, elle va jusqu’a révéler un secret de polichinelle jusqu’ici tabou dans le clan des pro Hadopi : «de nombreuses autres plateformes françaises ou européennes connaissent également de sérieuses difficultés».
Ca bouge également rue de Valois
Selon nos informations, Frédéric Mitterrand, le ministre de la Culture, jusqu’ici jusqu’au boutiste sur le dossier de l’Hadopi, serait lui aussi en pleine remise en question. Le patron de la rue de Valois commencerait à s’apercevoir que le fait de n’avoir fait qu’écouter exclusivement la seule voix des majors est en train de mener l’ensemble de la filière dans le mur, non seulement vis à vis des consommateurs, mais également d’un point de vue industriel. La perspective de voir un marché entièrement dominé par Apple, qui a les moyens et le modèle économique pour financer à perte la distribution musicale, et attendre ainsi de pouvoir abbatre un à un ses acteurs, fait passer les vilains pirates pour d’aimables plaisantins avec qui il eut été bien plus facile de faire des compromis. On se souvient du résultat de la lutte à mort qui avait eu lieu entre le patron d’Apple et celui de Disney, qui avait abouti à la prise de contrôle de Disney par Steve Jobs, et personne, en dehors de Pascal Nègre à l’évidence, n’imagine qu’il en sera autrement le jour ou Apple jettera son dévolu sur l’industrie du disque.
Apple en embuscade
Rachat de Lala, apparition discrète d’une fonction de streaming musical entre iPhone et iDisk, investissement d’un milliard de dollars dans un datacenter conçu pour le cloud computing, et pour couroner le tout, une étude du très sérieux NPD qui montre comment Apple pourrait voir ce marché faire bondir son chiffre d’affaire d’un milliard… Il est vrai qu’avec une clientèle largement habituée à payer pour ce qu’elle consomme et 35 millions de consommateurs qui ont déjà confié à Apple leur numéro de carte de crédit et peuvent acheter sur iTunes en un clic… A 10$ l’abonnement mensuel illimité en stream, Apple pourrait réaliser un chiffre d’affaire de 120$ par an et par client là où il plafonne à 45$ aujourd’hui. Pour Russ Crupnick, Vice Président en charge des études du secteur de l’entertainment du NPD Group, c’est un pari gagnant. Reste qu’un accord n’a toujours pas été signé entre Cupertino et les majors, mais le dernier coup d’essai montre clairement qu’Apple n’a pas abandonné l’idée, et un boulversement des rapports de force entre lobbies et autorités ne pourrait que faire avancer ses pions dans la partie d’échec engagée avec l’industrie du disque depuis des années. Finalement, la perspective d’un marché monopolistique et fermé promise par Apple, qui séduisait tant les majors quand ils s’imaginaient être en haut de la chaîne alimentaire, n’est plus si tendance. La gratuité pour le consommateur comme dernier rempart face à une mort violente ? La gestion collective des droits et la licence globale, finalement, seraient un moindre mal pour les anciens maitres des forges de la Culture.
Tags : apple, Frédéric Mitterrand, jiwa, Musique, Pascal Nègre
« s’imaginaient être en haut de la chaîne alimentaire »
Comme c’est bien dit 😀